Constatant l'«engorgement de toute la chaîne pénale et la surpopulation
carcérale», Didier Migaud définit «les chantiers prioritaires» du
ministère de la Justice.
Communiqué du ministère de la Justice du 20 novembre 2024 :
Face au constat des retards du Plan 15 000 places de prison, de l’engorgement de toute la chaîne pénale et de la surpopulation carcérale, Didier Migaud, garde des Sceaux, ministre de la Justice, lance trois missions d’urgence pour recentrer la justice judiciaire sur son rôle, juger dans des délais plus raisonnables et exécuter plus rapidement les peines.
« Opération vérité » sur le Plan 15 000
Les retards pris dans le plan de construction de 15 000 places de prison ne permettront pas de livrer l’ensemble du parc attendu en 2027, alors que la population carcérale explose. Il est donc nécessaire d’augmenter rapidement le nombre de places livrées.
Pour atteindre cet objectif, Didier Migaud souhaite utiliser l’ensemble des leviers possibles, qu’ils soient juridiques, en ajustant les textes afin d’accélérer les procédures, ou opérationnels, en adaptant mieux les types d’établissements pénitentiaires aux différents profils des personnes détenues, en réhabilitant des établissements désarmés, en mobilisant du foncier pénitentiaire pour construire des structures modulaires, en envisageant la conversion d’autres bâtiments non utilisés, etc.
Les besoins sont considérables, tant pour garantir la fermeté de la réponse pénale et l’effectivité des peines prononcées que pour améliorer les conditions de travail des personnels pénitentiaires et assurer des conditions de détention dignes.
Des mesures concrètes pour dépasser ce constat : lancement de trois missions d’urgence
Didier Migaud déclare : « J’actionnerai tous les leviers possibles pour accélérer le rythme actuel de construction de nouvelles places de prison car c’est une nécessité absolue pour notre pays. Mais chacun sait que cela ne suffira pas à régler tous les maux de notre chaîne pénale qui apparaissent aussi plus en amont. Les Français attendent une justice plus rapide et, s’agissant du pénal, des sanctions plus immédiates. Il nous faut agir, comme l’a demandé le Premier ministre dans sa déclaration de politique générale. Même si des progrès ont été réalisés, des marges importantes existent pour redonner confiance à nos concitoyens. »
C’est pourquoi le garde des Sceaux lance trois missions d’urgence, pour aboutir d’ici le mois de février à des propositions d’actions juridiques et opérationnelles.
Première mission d’urgence : recentrer la Justice sur son rôle
La Justice est aujourd’hui embolisée et parvient difficilement à traiter le cœur de son métier. Ces difficultés se rencontrent partout en dépit du plein engagement des professionnels de la Justice, magistrats, greffiers, assistants ou agents administratifs.
Les contentieux explosent alors que certaines procédures pourraient être traitées par d’autres voies ou d’autres juges.
Didier Migaud souhaite trouver des dispositifs alternatifs, notamment pour les actes de la vie quotidienne. Par exemple, il est possible d’améliorer le développement des procédures amiables pour résoudre certains conflits. On peut aussi envisager de confier à l’administration le soin de traiter certaines catégories de procédures sous le contrôle du juge plutôt que demander au juge de faire lui-même, ou encore de transférer certains contentieux du juge pénal vers le juge financier ou administratif (en explorant par exemple le champ des marchés publics et de la commande publique).
Tout ce qui peut contribuer à désengorger la justice judiciaire doit être entrepris.
Cette mission d’urgence sera confiée à deux membres du Conseil d’Etat, deux membres de la Cour de cassation et deux membres de la Cour des comptes.
Deuxième mission d’urgence : juger dans des délais raisonnables
Aujourd’hui, les délais pour qu’une audience se tienne sont trop longs, que ce soit en matière civile, criminelle ou correctionnelle. Les conséquences sont réelles pour les justiciables, particulièrement pour les victimes, qui attendent trop longtemps la tenue des procès qui les concernent. Mais il y a également, à terme, un risque de remise en liberté des accusés ou des prévenus placés en détention provisoire.
La Justice doit être en capacité de juger ces affaires dans des délais plus raisonnables.
Face à ces enjeux, toutes les options sont sur la table, dans le respect des droits de chacun et sans priver ceux qui en ont besoin du droit d’accéder à la Justice. L’important est de pouvoir identifier rapidement les moyens d’action pour restaurer l’équilibre d’un système qui ne fonctionne plus de manière satisfaisante aujourd’hui, ce que tous les acteurs de la Justice reconnaissent.
Cette mission d’urgence sera confiée à des membres de la magistrature et du barreau.
Troisième mission d’urgence : exécuter les peines plus rapidement
Didier Migaud le martèle : « Il est indispensable d’assurer une réponse pénale ferme mais humaine, rapide et efficace, tout en luttant contre la récidive. C’est ce qu’attendent les Français et c’est une priorité de mon ministère. La prison est nécessaire, elle est là pour punir et protéger les citoyens, mais l’incarcération doit se faire dans des conditions sécurisées pour les agents et dignes pour les détenus ».
Des efforts ont déjà été réalisés sur l’exécution des peines, mais d’autres leviers doivent être mobilisés pour que l’ensemble des peines prononcées, incluant les courtes peines d’emprisonnement, soient effectives et plus immédiates, y compris pour les mineurs, comme annoncé par le Premier ministre. Parmi les objectifs essentiels de la peine figurent aussi l’absence de récidive et la réinsertion.
Cela suppose d’envisager tous les outils possibles pour faire face à la surpopulation carcérale, y compris les mesures alternatives à l’incarcération pour les infractions de faible gravité.
Cette mission d’urgence réunira des membres de la magistrature, du barreau et de l’administration pénitentiaire