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> Faits Divers > En Saône-et-Loire
08/03/2024 03:17
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AUTUN : Après 6 semaines de prison, il espérait ressortir, mais quand on a trop fumé et que l'on est en récidive, ce n'est pas si simple...

Son permis a été annulé, son Audi confisquée et il devra sans doute regarder l'Euro de foot, le Tour de France et les JO à la télé, en prison...
Il était incarcéré depuis 6 semaines, en détention provisoire, et voilà pas que le tribunal le condamne à la peine de 12 mois ferme avec maintien en détention : l’homme encaisse avec peine la décision. Il voulait tant rentrer chez lui et s’occuper de son fils.
Maître Ronfard a pourtant plaidé avec force « contre une vision simpliste de l’addiction », mais l’état de récidive du prévenu (récidive de récidive, même), un rapport de mesure de probation positif alors qu’il n’avait jamais cessé de se droguer, un casier qui malgré une bonne pause, a repris les choses là où elles s’étaient calmées en 2016, tout cela va tenir cet homme de 47 ans en prison pour un moment.

Temps de surpopulation carcérale nationale
C’est pas que le centre pénitentiaire de Varennes-le-Grand ait des places libres à proposer en ce moment, mais les probationnaires qui récidivent le paient toujours. Les conseillers d’insertion et de probation font un travail de fond important dans l’intérêt des condamnés, les bananer n’est jamais une bonne idée. La hâte de sortir par le haut d’un temps de sursis probatoire en disant ce que l’institution judiciaire aime entendre, n’est pas une stratégie gagnante.
Le 21 janvier dernier en milieu d’après-midi, les gendarmes d’Autun contrôlent des véhicules et notamment une Audi A3. « Visiblement les gendarmes l’attendent en bas de chez lui, ce qui n’a pas manqué de me surprendre quand j’ai lu le dossier, mais passons » dira l’avocat du prévenu.

Contrôle et perquisition
Bref, en bas ou plus loin, l’homme qui est au volant n’a pas le droit de conduire, son permis est suspendu depuis novembre dernier, suite à une conduite en ayant fait usage de stupéfiants. De surcroît le dépistage salivaire est positif au cannabis et à la cocaïne (dépistage confirmé par une expertise, d’où ce jugement décalé dans le temps, puisqu’on est le 7 mars). Enfin, la perquisition de son domicile donne un peu plus de 27 grammes de cannabis, « outre des munitions qui n’ont pas fait l’objet de poursuites mais qui ont été détruites avec le cannabis », précise la présidente Catala.
Le coup des courses au supermarché, ça ne va pas le faire, parce qu’il sort d’une période de probation et qu’il aurait quand même pu se trimballer un caddie pour transporter les croquettes du chien, plutôt que de tenter le tour en voiture, sans permis et avec de la drogue dans le sang.

Une instruction très pédagogique
La présidente mène une instruction très pédagogique parce qu’une classe de lycéens chalonnais (des secondes du lycée E. Gauthey) assiste à l’audience. Et quand la juge demande au prévenu de rappeler quel était sa profession en novembre dernier, et qu’il répond « chauffeur routier », des lycéens réagissent à bas bruit, choqués.

Le coup de la cocaïne « festive » ne passe pas
Ah une vie humaine, on l’écrit souvent, c’est pas simple, non. Mais quand on perd son permis (suspendu) à cause des stupéfiants, qu’on en perd son travail à la suite, et qu’on remet le couvert quelques semaines plus tard, c’est comme si on cherchait un peu les ennuis. Pareil, le coup de la cocaïne « festive » ne passe pas. Quand bien même des potes de toxicomanie lui en fileraient gratos quand ils font la fête, il ferait mieux de s’abstenir.

Entre échec sentimental et vie parentale, la musique de fond, c’est l’addiction
Son casier n’est pas hyper lourd mais la majorité des condamnations est relative à l’usage de stupéfiants. C’est un toxicomane qui dit avec force s’être sorti de l’héroïne et avoir connu une période de vie sobre, lorsqu’il a fondé famille. Mais sa femme est partie avec un autre.
Elle n’a pas su assumer la charge de leur fils, alors il a récupéré cet enfant (devenu grand) auquel il tient beaucoup. Il était désespéré quand il a été arrêté puis présenté au procureur, tant il se faisait du mouron pour son ado.
Entre échec sentimental et vie parentale, la musique de fond, c’est l’addiction. S’il est en comparution immédiate c’est que les faits de novembre dernier ne l’ont pas arrêté. Il ne s’arrête pas de lui-même ? On l’arrête de force. Il dit savoir les risques de ces conduites altérées par des toxiques.

« Il continue, alors qu’il a déjà été condamné pour ça »
Madame Girard-Berthet, substitut du procureur, le répète : « Il continue, alors qu’il a déjà été condamné pour ça. Je pense qu’il n’a pas joué franc-jeu avec son conseiller d’insertion et de probation. Les facteurs de protection - un emploi et son fils à domicile – n’ont pas suffi. »
Elle requiert la peine de 24 mois de prison dont 6 mois seraient assortis d’un sursis probatoire pendant 2 ans. Maintien en détention pour les 18 mois ferme, « pour qu’il puisse réfléchir aux conséquences de ses actes ».

« Il n’est pas que ça ! »
« Il avait changé de région, il avait trouvé un emploi, il suivait des soins. Sa maman est là. Elle lui avait trouvé un centre dans le Beaujolais pour faire une cure de sevrage mais on lui a répondu qu’il ne répondait pas aux critères. Il fume un joint le soir, parce qu’il ressasse. Mais il n’est pas que ça ! »

« Contre une vision simpliste de l’addiction »
La défense s’élève, comme on l’a écrit en tête d’article, « contre une vision simpliste de l’addiction », et restaure son client dans sa dignité de père et de « bosseur ». Thomas Ronfard plaide en faveur d’une peine aménagée : « Six semaines de détention… le déclic, si tardif pour la juridiction, a eu lieu, je veux le croire. » Et en six semaines, il n’a de toute façon pas eu un seul rendez-vous pour réengager des soins.
Le prévenu conclut : « Je regrette et je vous demande de me libérer. J’ai trop de choses à perdre. »

12 mois en prison puis deux ans sous main de justice
Le tribunal le condamne à la peine de 18 mois de prison dont 6 mois sont assortis d’un sursis probatoire pendant 2 ans, avec obligations de soins, de travailler, et de payer les frais de procédure. L’homme est maintenu en prison pour les 12 mois ferme. Le tribunal constate l’annulation de son permis et ordonne la confiscation de l’Audi A3, de son certificat d’immatriculation et de ses clés, en vue de son affectation aux services de gendarmerie.
FSA