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> Faits Divers > En Saône-et-Loire
26/07/2024 08:10
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AUTUN : «La prison m’a sevré»

Dans le box, un homme âgé de 41 ans qui dit souffrir de schizophrénie depuis ses 30 ans...
Contrôlé à Autun le 26 février au volant malgré une suspension de permis et sous THC, il ressort de la gendarmerie avec une convocation au tribunal en automne. Contrôlé le 7 juin, toujours au volant, toujours sans permis et cette fois-ci chargé de cocaïne, de cannabis, de kétamine, de ,e et d’ecstasy, il est placé en détention provisoire.

Les renvois faute d’expertises psychiatriques pleuvent
Coup double ? Direction, comparution immédiate. Enfin... pas si immédiate* que ça car le prévenu est sous curatelle renforcée, il faut obligatoirement une expertise psychiatrique. Le dossier, présenté le 17 juin dernier, est donc renvoyé au 25 juillet mais ce jeudi l’expertise n’est pas faite...

En principe, il faudrait renvoyer encore mais le tribunal est tenu par un délai. Renvoyer encore c’est courir le risque de se trouver Gros-Jean comme devant, avec un prévenu qui devient libérable sans qu’aucun « garde-fou » comme dit le président Marty, n’ait pu être mis en place.

… ce jour, le tribunal a un plan B
Pour ce dossier le tribunal a un plan B : un juge des contentieux de la protection (JCP) , plus simplement appelé « juge des tutelles », a transmis au tribunal un certificat médical de juin 2020, établi à l’appui de la demande de la mesure de protection civile.

Dans tous ses états
Dans le box, un homme âgé de 41 ans qui dit souffrir de schizophrénie depuis ses 30 ans. Il reçoit une injection retard et un neuroleptique mais dans quelle mesure ce mal est-il en lien avec des addictions puissantes, on ne sait pas. Ce qu’on sait et la représentante du ministère public le rappellera, c’est que de tels cocktails ne peuvent pas l’aider à aller mieux.

Les deux fois il allait « mettre de l’essence »…
Sur les faits, que dit le prévenu ? Que les deux fois il allait « mettre de l’essence ». Ah, ça veut dire que vous conduisez habituellement, lui renvoie la substitut du procureur. Non, non, répond l’homme. La première fois je mettais de l’essence pour mes parents qui venaient me voir…
La seconde j’emmenais ma compagne à l’hôpital parce qu’elle souffrait trop. « Vous avez été contrôlé dans le sens inverse du trajet qui mène à l’hôpital, objecte le président. – C’est que j’allais prendre de l’essence. » Pas super convaincant, le prévenu.
D’ailleurs la procureur requiert une peine de 15 mois de prison dont 5 mois seraient assortis d’un sursis probatoire pendant 3 ans, avec le maintien en détention pour la partie ferme.

« La prison m’a sevré » - « Parfois les fragilités reprennent le dessus ».
Le problème est double : ses addictions et la schizophrénie. Il a deux condamnations au casier, la dernière, en 2020, a signé la suspension de son permis. C’était pour conduite sous l’empire de l’alcool.
Il n’est guère convaincant sur ses prises de produits stupéfiants.
Le président lui demande pour quel motif il en avait ingéré autant, en juin. « C’était pour me détendre. J’avais envie, et puis voilà. »
Il n’a pas d’enfant, vit en couple, évoque d’ailleurs souvent sa compagne, proie elle aussi de la toxicomanie mais qui tâche de s’en sortir. « On s’est écrit, on va se soutenir. Moi, la prison m’a sevré. » Le président se méfie des rechutes, « parfois les fragilités reprennent le dessus ».

La carence d’experts psychiatres est un gros problème
Maître Ndong Ndong plaide l’absence d’expertise et l’insuffisance du plan B : se référer à un certificat médical, c’est embêtant, car rien ne vient répondre à la question posée aux experts sur la responsabilité pénale du prévenu. L’avocat explique que son client est bac + 3, eut une expérience professionnelle « notable » mais a plongé dans la polytoxicomanie. En faveur du sevrage :
« Aujourd’hui il a repris du poids, il se tient mieux et il a moins de zigzaguements cognitifs ». Alors « une obligation de soins, oui » mais la prison, « non ». « On est dans le cas d’une personne qui a besoin de beaucoup de choses, et pas uniquement de répressif ! »

Altération du discernement et 15 mois de prison au-dessus de la tête
Le tribunal est juste puisque malgré l’absence de toute expertise, il retient l’altération du discernement et condamne cet homme à la peine de 15 mois de prison entièrement assortis d’un sursis probatoire renforcé pendant 2 ans. Obligations de travailler, de suivre des soins en psychiatrie et en addictologie, de payer le droit fixe de procédure ainsi que de justifier de la remise des clés et des papiers de son véhicule, qui est confisqué. Son permis de conduire est annulé, il a l’interdiction de le repasser avant deux années.
« Le tribunal espère que vous avez conscience de l’extrême dangerosité de votre comportement. Si vous commettez la moindre infraction ou si vous ne répondez pas aux convocations, vous vous exposez à 15 mois de prison. »
FSA

*en ce cas c’est une CDD : comparution à délai différé