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> Faits Divers > Tribunal
02/09/2023 03:16
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SULLY : Du sursis et une suspension de permis pour un accident qui aurait pu "arriver à chacun"

Le 31 juillet 2021, un homme âgé de 58 ans a perdu la vie sur la D973, sur la commune de Sully. Il roulait à moto. Une Clio qui arrivait d’une petite route perpendiculaire à la départementale s’est engagée pour traverser les deux voies et partir en direction d’Autun...
Des arbustes gênaient un peu la visibilité, la conductrice a avancé un peu le nez de la voiture. Elle a regardé à gauche et à droite, a laissé passer un véhicule, puis a de nouveau regardé. « J’ai vu une ombre s’approcher de moi et je n’ai pas eu le temps de réagir, il y a eu le choc. Les airbags se sont déclenchés, il y avait de la fumée, je suis sortie, j’ai vu la moto. » Elle était en larmes.


Une faute d’inattention ? Oui


C’est une toute jeune femme qui est jugée ce vendredi 1er septembre par le tribunal correctionnel du TJ de Chalon sur Saône : elle est née en 2000, elle avait le permis depuis 5 mois. Elle n’a pas commis de faute grave, de manquement aux règles du code de la route, c’est le parquet lui-même qui le dit. Une faute d’inattention ? Oui, répond maître Mignot qui intervient pour les parties civiles (le fils unique du défunt et son petit-fils). « Elle dit qu’elle n’a pas vu la moto, et je la crois. Mais elle aurait dû la voir. »

« Une faute simple »


« Le choc a eu lieu au niveau de la roue avant-gauche du véhicule : madame a commis une imprudence, mais sans violation délibérée des règles de sécurité » développe la représentante du ministère public. La magistrate demande la requalification des faits en « homicide involontaire par conducteur d’un véhicule terrestre à moteur » : « une faute simple ». Elle requiert la peine de 6 mois de prison avec sursis et la suspension du permis de conduire pendant 5 mois.

Dans une marge étroite que tout conducteur connaît


L’audience est terrible pour le fils de la victime, l’audience est une épreuve pour celle qui doit répondre d’homicide involontaire mais l’audience est intéressante car elle se tient dans une marge étroite que tout conducteur connaît et que chaque avocat va dire à sa façon.

« Les automobilistes raisonnent par masse »


Pour maître Mignot, lui-même motard : « La moto était visible deux secondes avant le choc. Le motard n’a même pas eu le temps de freiner, tellement madame a surgi. Les automobilistes, par fainéantise ou par facilité, lancent un regard à gauche et à droite et raisonnent par masse. » L’avocat dit qu’on regarde par réflexe automatique, sans prendre pleinement conscience de ce qui se présente réellement. « Ce qu’on recherche, c’est une masse, c’est un véhicule, et donc on ne recherche pas une moto. »

Douleurs


La part difficile revient à la défense : dire ce que cet accident a pu avoir de traumatisant pour la jeune femme tout en faisant évidemment droit à la douleur des proches de l’homme décédé (quasiment sur le coup, c’est la violence du choc lorsque son corps, projeté par-dessus la Clio 20 mètres plus loin, a claqué le bitume, qui l’a tué, ndla). « Le conducteur responsable d’une infraction involontaire est aussi dans la culpabilité. Elle se rendait sur son lieu de travail et elle a tué quelqu’un : ça la met dans une position morale extrêmement difficile. Cette jeune fille avait les larmes aux yeux quand vous lui avez demandé son ressenti aujourd’hui : ça remonte tout seul. »

« A mon avis, ce qui s’est passé peut arriver à chacun »


« Elle devait traverser les deux voies. Le rapport de gendarmerie dit qu’il y avait un problème de visibilité (la prévenue a expliqué que depuis l’accident, les arbustes ont été coupés). Le conducteur est dans un habitacle : on est obligé d’avancer un peu le véhicule, car les yeux du conducteur ne sont pas sur le capot ! (…) Ce ne sont pas des dossiers qu’on aime plaider, car on comprend bien la douleur de la famille, mais je comprends celle de madame aussi. A mon avis, ce qui s’est passé peut arriver à chacun. »


10 mois de prison avec sursis, et suspension du permis de conduire


Le tribunal requalifie donc les faits, déclare la jeune femme coupable et la condamne à la peine de 10 mois de prison avec sursis, ainsi qu’à la suspension de son permis de conduire pendant 12 mois.
FSA

Renvoi sur intérêts civils en octobre. Maître Mignot s’y opposait, mais les délais sont visiblement plus courts sur la juridiction de Chalon que sur celle de Dijon.