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15/12/2022 16:00
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Agriculture et élevage : «Touche pas à ma compétence», clame la Région Bourgogne - Franche-Comté… «Ca ne vas pas se passer comme ça», répond la Saône-et-Loire

Le torchon brûle entre les départements, dont la Saône-et-Loire, et le Conseil Régional de Bourgogne - Franche-Comté. La Région veut verrouiller la compétence que la loi lui a donnée. La Saône-et-Loire qui a déjà beaucoup donné ne l'entend pas de cette oreille. La gauche a fait de la gymnastique pour soutenir la position régionale, tout en votant pour la négociation d'un avenant.
C’est bien le seul sujet qui, ce jeudi matin, a fait monter la tension à l’Hexagone à Autun. Ce sujet, c’est celui de l’agriculture dont on sait ce qu’elle pèse en Saône-et-Loire, berceau de la race charolais. Une Saône-et-Loire aux multiples AOC, avec la volaille de Bresse, des fromages de chèvres et évidemment le meilleur des vins de Bourgogne du Sud.
Ce poids de l’agriculture a conduit le conseil départemental a apporter des aides aux éleveurs et agriculteurs qui avaient été frappés par la sécheresse. Ce qui avait été voté à l’unanimité par les élus. La collectivité s’est aussi investie en décidant de replanter des arbres, mais aussi en aidant les agriculteurs à investir dans des récupérateurs d’eau.
La loi a donc changé et aujourd’hui elle permet aux Régions de piloter et de décider de la politique agricole. Ce qui dans l’absolu interdit aux départements d’aider l’agriculture. Pas du goût des conseils départementaux et notamment de celui de Saône-et-Loire qui n’a pas attendu cette fin décembre pour monter au front.

Une longue attente de juillet à décembre...

C’est ce que Frédéric Brochot a rappelé : «En juillet 2022, le Département de Saône-et-Loire a sollicité la Région Bourgogne Franche Comté pour travailler ensemble la nouvelle convention sur les conditions d’interventions de chacune des collectivités en matière de développement économique pour les secteurs de l’agriculture (dont la pêche et l’aquaculture), de l’agroalimentaire et de la forêt, pour la période 2023-2027.
Depuis, le Département de Saône-et-Loire a multiplié les relances, comme tous les autres départements de la Région Bourgogne-Franche-Comté, en vain. Courant novembre, l’ensemble des Départements a été informé par la Région BFC qu’ils ne pouvaient plus poursuivre leur politique agricole ni les actions déjà engagées.

5 millions pour l'agriculture en 71

Dans l’intérêt du monde agricole, ces derniers ont décidé de proposer une autre convention à la Région. Le Département de Saône-et-Loire propose donc aujourd’hui cette nouvelle convention qui prévoit la complémentarité d’objectifs sans co financement systématique et intégrant la notion de réelle concertation. En attendant cette nouvelle convention, le Département de Saône-et-Loire prolonge un avenant à la précédente qui arrive à échéance le 31 décembre 2022».
Frédéric Brochot a aussi rappelé que «Le Département de Saône-et-Loire est un acteur majeur et indispensable pour
le monde agricole auquel il consacre un budget annuel de 5 millions d’euros». Pas une paille !

La loi rien que la loi...

La Saône-et-Loire n’apprécie pas le traitement que la Région veut lui réserver et c’est Frédéric Cannard, qui au nom du groupe Gauche 71, s’est chargé de défendre Marie-Guite Dufay et la Région. En lançant : «Il s’agit d’une évolution depuis longtemps entérinée, et nous savions tous que la précédente convention, prolongée jusqu’au 31/12/2022 marquait une passerelle vers cette nouvelle organisation, en lien avec la politique agricole commune définie par l’Union européenne à partir de 2023.
L’objectif des évolutions réglementaires n’est nullement d’exclure les départements du soutien à notre agriculture, mais bien de rationaliser les aides et subventions sur des thématiques prioritaires, pour gagner en efficacité et éviter les dispositifs doublons».
L’élu de la Bresse a aussi déclaré : «Depuis que ces trois propositions ont été formulées, vous avez reçu un courrier daté du 7 décembre dernier de la Présidente de la Région Bourgogne Franche- Comté. Courrier dans lequel il vous est proposé de faire état de vos inquiétudes et qui évoque la possibilité de poursuivre certaines interventions. La réponse est attendue au 31/12/2022.
Si je concède que le délai est court, je m’interroge sur les raisons qui rendraient impossible une réponse à cette demande dans les délais impartis : ne serait-il pas possible de répondre à cette demande, en reprenant les éléments de la convention en annexe 2. J’imagine qu’elle résume parfaitement vos attentes.
Bref, le temps n’est plus à se disputer le leadership sur ce domaine, et à contester la loi qui rappelle que la Région est bien le chef de file de lance en matière de politique agricole.
Et de vous rappeler que la loi et l’avis du préfet ne sont pas à géométrie variable : vous l’appliquez dès lors que ça vous arrange (cf. ADT), vous vous en affranchissez pour de sombres calculs politiques.

«Relever les enjeux»

Enfin, la volonté qui est la nôtre, et je sais que vous nous rejoignez sur ce thème, c’est de s’atteler à relever les enjeux de notre territoire. Ceux-ci sont de taille, car on le sait, il faudra produire différemment dans notre département de Saône-et-Loire, premier en nombre d’exploitations en région Bourgogne Franche Comté.
Si une politique d’avenir doit être écrite, je n’oublie pas ce qui se passe en ce moment pour nos agriculteurs.
La grippe aviaire en Bresse qui pénalise toute une filière, la hausse des tourteaux pour les éleveurs de porcs et pour une partie des éleveurs laitiers la hausse des tarifs EDF.
Avec le Sous-Préfet et la députée Cécile Untermaier, nous avons l’exemple d’un GAEC installé à St Germain-du-Plain pour qui, le kWh passe de 12 à 57 cts, soit une facture qui passe de 2500 € à 11 000 € par mois .... Alors même qu’ils sont exclus des dispositifs d’aides mis en place par le ministre de l’économie Bruno le Maire.
Il faut donc jouer collectif pour l’emporter et c’est un peu le résumé que m’a fait Christian Decerle, Président de la chambre régionale d’agriculture. A la lecture du rapport, je me suis rapproché de lui pour évoquer le travail qu’il venait de mener avec le conseil régional pour la future PAC 2023-2027. Il m’a rappelé que les relations étaient bonnes, qu’il n’y avait pas de soucis de fonds malgré quelques désaccords, mais que le travail avait été constructif.
Nous souhaitons vivement qu’un terrain de concertation soit trouvé avec la région, pour le bien de notre territoire et de nos agriculteurs, qui n’ont pas besoin de cette mauvaise querelle».
Frédéric Brochot lui a d’abord répondu : «Ce n’est pas le 7, mais seulement mardi que nous avons reçu le document». Le vice-président à l’agriculture a encore parlé de «mépris» de la région à l’égard des départements.
Et de lancer : «L’argent de la Saône-et-Loire, c’est plus de 2 millions pour les récupérateurs, qu’est-ce qu’on fera sur le service des remplacements.
On est unanimes, avec les collègues des autres départements pour dire que la région se trompe de chemin.
Je rappelle que l’on peut difficilement se protéger du loup, alors que la Région avec sa vice-présidente veut introduire encore plus le loup. Elle met en péril.
Le but n’est pas d’entrer en conflit. Aujourd’hui avec la grande région, il n’y a aucune concertation. Je ne laisserai pas faire cela et je ne laisserai pas partir le soutien agricole que l’on apporte».

«Aujourd’hui il vaut mieux être agriculteur ailleurs qu’en Bourgogne – Franche-Comté»

Jean-Luc Fonteray le président du groupe Gauche 71 lança alors : «On a la démonstration d’une négociation non accomplie. Fred Cannard l’a rappelé, c’est la loi.  Au sujet du loup, on s’est suffisamment impliqué, et on était unanimes, y compris la Présidente de Région»
André Accary lança alors à l'opposition ; «C’est votre lecture et votre ambition sur la politique agricole». Et Frédéric Brochot d'abonder : «Depuis juillet on a demandé une concertation construite. On n’a pas pu travailler, c’était porte close. On nous disait on va vous envoyer le projet...»
Avant de faire procéder au vote, André Accary se voulut cinglant : «Je fais confiance aux Présidents des huit départements qui sont très en colère. Aujourd’hui il vaut mieux être agriculteur ailleurs qu’en Bourgogne – Franche-Comté. La politique agricole dans notre département, cela a du sens. Cela mérite d’entendre les huit départements. Aujourd’hui si on se met à genoux, si on applique à la lettre, on fait quoi. Les récupérateurs d’eau on n’a pas attendu pour les mettre. Si on ne fait rien en terme de vote, à partir du 1er janvier on ne peut plus rien faire. Je rappelle qu’on a une proximité avec nos agriculteurs. Je demande aux élus de permettre de continuer à discuter. Monsieur Fonteray j’ai été élu comme vous, vous aussi vous avez à échanger avec les agriculteurs».

La gauche contre le rejet, mais pour un avenant

Le rejet de la convention a été approuvé, mais l'opposition s'est abstenue, comme elle s'est abstenue sur l'approbation de la convention que le département propose. Par contre, après avoir demandé une suspension de séance, Jean-Luc Fonterary annonça que le groupe Gauche 71 est favorable à signer un avenant. En décodé, comme à l'heure du repas un élu de la majorité le tacla : «La gauche n'a pas rejeté la convention mais elle veut bien des avenants. Où est la logique ?»
Alain BOLLERY