
Les avocats appellent les Parlementaires à s'opposer à la proposition de Loi.

Un projet de réforme de la justice des mineurs à la fois « inutile et inquiétant »
Ce
lundi 5 mai, les avocats du barreau de Chalon-sur-Saône se sont
rassemblés, avec la PJJ, comme leurs confrères partout en France, et
nombre de magistrats, pour dénoncer les dispositions du projet de loi
dite « Attal » concernant la justice des mineurs.
Aux parlementaires de s’opposer aux dispositions de la proposition de loi
Benoît
Diry, nouveau bâtonnier, a donné lecture de la motion adoptée par le
conseil de l’ordre du barreau. « Le Code de la Justice pénale des
Mineurs (CJPM) est récent, est l’aboutissement de dix ans de travaux et
d’études, il reprend le principe de la primauté de l’éducatif sur le
répressif, et ces dispositions sont conformes à la Constitution et aux
engagements internationaux de la France. »
En effet, ce code date de
mai 2021 ! Il contient tout ce qu’il faut pour intervenir en fonction
des nécessités. Pourquoi réformer trois ans plus tard ? A quelles fins ?
« On fait croire à la population que… alors que »
Nordine
Latrèche est éducateur à la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ)
et co-secrétaire du SNPES-FSU du territoire 21 et 71 : « En termes de
sanctions, on fait croire à la population qu’on manque de peines alors
qu’on les a toutes. Beaucoup de jeunes sont en centres éducatifs fermés
(CEF) et beaucoup sont incarcérés. La loi telle qu’elle existe depuis
2021, permet de juger vite, sous dix jours, permet de placer un mineur
en détention provisoire, aussi. »
Les rapports de la PJJ sont des
pièces essentielles dans les procédures puisque l’idée reste de juger au
mieux, c’est-à-dire de faire preuve de discernement quant aux
évolutions de certains, à l’obstination d’autres, etc.
« La loi de 2021 est équilibrée : l’éducatif prévaut mais le répressif y est renforcé »
Maître
Agnès Ravat-Sandre, membre de la conférence des bâtonniers, y est
chargée des questions relatives aux mineurs : « Le barreau de Chalon a
pris une motion, à l’instar des autres barreaux, qui reflète
l’inquiétude des avocats face aux grandes lignes du projet de loi dit
Attal qui veut supprimer ce qui est au principe de la justice des
mineurs : la primauté de l’éducatif sur le répressif.
La loi de 2021
est équilibrée : l’éducatif prévaut mais le répressif est renforcé.
Ainsi le code pénal de la justice des mineurs respecte la convention
internationale des droits de l’enfant, ainsi que les principes
institutionnels et constitutionnels du pays. Il compte des moyens
d’exceptions, pour faire face au cas d’exceptions : on peut placer un
mineur en détention provisoire et le juger rapidement. Si l’atténuation
de responsabilité pour cause de minorité est automatique, le tribunal
pour enfant peut la rejeter, ce cas de figure existe déjà. Le projet de
loi veut faire de l’exception une généralité ! »
Une raison structurelle s'ajoute à toutes les autres
« Vouloir
des comparutions immédiates pour des mineurs ? Comment résoudre la
question du consentement à être jugé selon cette procédure ? Réunir un
tribunal pour enfant dans l’urgence ? Mais on manque de juges et de
greffiers, on manque d’assesseurs. La profession s’élève d’une seule
voix pour dire que ça n’est pas possible, y compris pour des raisons
structurelles qui s’ajoutent aux autres. »
Le bâtonnier Diry ajoute à
ce sujet : « On pourrait croire que renforcer le répressif pourrait
être un moyen déguisé de contourner le manque de moyens éducatifs ici et
là. Tout en créant, au final, la nécessité de nouveaux besoins ! »
Le
projet de loi qui sera à compter de demain examiné en commission
paritaire (composée de sept sénateurs et de sept députés) n’apporte rien
à ce qui existe déjà, en revanche il en tue l’esprit. Cela ne serait
pas sans conséquences sur l’ensemble des citoyens, le barreau de Chalon
en est conscient.
Être vigilant, davantage, en ce moment, à ce qu’on veut
Pourquoi un projet de loi décrit comme inutile par les professionnels ?
« Mais
Gabriel Attal veut sa loi » écrivait un grand quotidien national le 12
février dernier. A quoi tiennent les choses, décidément. A une vanité de
carrière ? A des faits mal qualifiés de « divers » lorsqu’il s’agit de
tragédies, dont s’emparent comme d’un prétexte (en en faisant donc un
« fait divers »), l’instrumentalisant, les politiques. A un emboîtement
avec l’air du temps ?
Ce mélange des discours est certes habituel et
peut-être inévitable, mais il est toxique quand il conduit à affirmer
qu’il faut « restaurer l’autorité de la justice », comme si celle-ci en
manquait (ce n’est pas le cas) et comme si l’institution judiciaire
elle-même ne faisait pas les frais d’une usine à gaz législative.
Tout
ça pour dire que les politiques, parce qu’ils ont accès à toutes les
tribunes, portent évidemment une grande responsabilité dans la promotion
de tel ou tel discours, mais s’en déchargent un peu trop facilement.
En
l’occurrence si des jeunes gens, des mineurs, ont des passages à l’acte
parfois criminels, ça serait parce que l’institution judiciaire
manquerait d’autorité ? C’est faux, et sous couvert de s’intéresser à
l’institution, ce discours là ne lui rend pas service, en réalité. Et
ça, c’est inquiétant.
À quelles fins ?
Peut-on, au nom d’une
répression évidemment nécessaire mais dont on trouve déjà tous les
moyens dans « l’arsenal législatif » comme on aime à le dire, renverser
l’esprit qui gouverne la justice des mineurs, jusqu’à contrevenir
ouvertement aux conventions internationales qui lient l’Etat français,
et, enfin, mettre à mal un dispositif qui depuis 2021, a montré qu’il
est opérant ?
Il n’est question, ici, ni de droite ni de gauche. La démagogie n’a pas de bord de prédilection.
Il
est question de permettre, ou non, à une civilisation de se maintenir
et éventuellement de croître, ou, à l’inverse, de l’écraser.
L’actualité
de l’autre côté de l’Atlantique rend cette question brûlante, nous ne
sommes absolument pas hors sujet de l’évoquer ici. Il convient d’être
attentif, davantage que d’ordinaire, à satisfaire ce qui permet de faire
société sans tuer ce qui porte de la vie, des possibles.
FSA
L’ignorance nous laissant toujours dépendants :
https://www.legifrance.gouv.fr/codes/section_lc/L...Le Conseil de l'ordre du Barreau de CHALON SUR SAONE, réuni le 16 avril 2025 :
Connaissance
prise du Projet de loi visant à "restaurer l'autorité de la justice à
l'égard des mineurs délinquants et de leurs parents",
Connaissance
prise des débats parlementaires ayant eu lieu devant l'Assemblée
Nationale et le Sénat, la Commission Mixte Paritaire étant saisie,
Rappelle
que le Code de la Justice pénale des Mineurs (CJPM) est récent, qu'il
est l'aboutissement de dix ans de travaux et d'études, qu'il reprend le
principe de la primauté de l'éducatif sur le répressif, que ces
dispositions sont conformes à la Constitution et aux engagements
internationaux de la France. (Article 40 de la CIDE)
Rappelle que la
justice des mineurs ne peut être modifiée sans vraie réflexion, pour
répondre précipitamment à des faits divers ultramédiatisés et qui ne
concernent pas seulement des mineurs,
Rappelle que certaines
dispositions du CJPM permettent à la juridiction des mineurs de les
juger rapidement, par exception, qui doit le rester, au principe de la
césure instauré par ce
Rappelle l'importance des mesures éducatives
destinées à faire évoluer tout mineur en difficulté, et les moyens
d'ordre budgétaire qu'il doivent y être consacrés, tant dans les
juridictions pour mineurs, qu'au profit des services éducatifs (PJJ et
associations habilitées)
En conséquence,
S'oppose à la procédure de comparution immédiate applicable aux mineurs, âgés de 15 ans ou plus,
S'oppose
à la suppression de l'atténuation de responsabilité due à la minorité,
quelles que soient les infractions commises, un mineur ne pouvant être
jugé comme un majeur, du fait de son immaturité,
S'oppose à la
possibilité de voir prononcer des peines d'emprisonnement ferme d'une
durée inférieure ou égale à un mois avec incarcération immédiate.
S'oppose aux mesures de rétention provisoire de 12 heures en Centre Educatif Fermé.
Demande solennellement à chaque Parlementaire de s'opposer aux dispositions de la proposition de Loi.
